ÉLOGE FUNÈBRE DU MÉDECIN GÉNÉRAL RAYMOND BOLZINGER ( )* - PDF Téléchargement Gratuit (2023)

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1 ÉLOGE FUNÈBRE DU MÉDECIN GÉNÉRAL RAYMOND BOLZINGER ( )* par le Docteur Jean-Marie ROUILLARD Le Médecin Général Raymond Bolzinger, Président Honoraire de notre Compagnie, est décédé le 10 mai 1983 à Page de 82 ans. Notre Président m'a fait l'honneur de me désigner pour prononcer l'éloge traditionnel; mais c'est également un pieux devoir que j'ai la douloureuse satisfaction d'accomplir, car j'ai la faiblesse de penser que le Général Bolzinger l'aurait souhaité. C'est aussi l'occasion pour moi de payer, autant que faire se peut, une dette de reconnaissance. Peu de temps après mon retour à Metz, j'ai eu l'occasion de mieux apprécier notre confrère au Bureau de la Société des Sciences Médicales de la Moselle, puis dans l'organisation et la mise en place de certaines structures de la lutte anti-cancéreuse. Parallèlement, le Médecin Général avait favorisé les contacts de l'hôpital N.-D. de Bon-Secours avec le Service de Santé Militaire et nous avait permis des visites fructueuses de l'hôpital Militaire de Buhl où nous allions chercher un modèle pour nos projets hospitaliers messins; en effet, nous connaissions la compétence avec laquelle, sous sa direction, cet établissement avait été conçu et réalisé. C'est le Médecin Général Bolzinger qui proposa à l'académie ma candidature comme membre associé libre, puis lui demanda ma confirmation comme membre titulaire et chaque fois avec une partialité et une indulgence qui continuent à me confondre et à m'émouvoir. Plus tard, contraint de restreindre ses activités, il demanda à ce que je le remplace comme Président de la commission des Prix Scientifiques et de l'agriculture. Enfin, lors de ses dix hospitalisations, j'ai pu être un témoin privilégié de certains aspects d'une personnalité hors du commun. C'est pourquoi, conscient que d'autres dans cette Compagnie l'auraient fait avec plus de talent, j'ai néanmoins accepté d'évoquer devant vous, la vie de notre regretté confrère. * Prononcé à la Séance du 5 janvier 1984.

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3 Raymond Bolzinger est né le 21 avril 1901 à Saint-Agnan, commune d'ogy. Ce fait est rappelé dans l'ouvrage que notre éminent et dévoué secrétaire-adjoint Monsieur l'archiprêtre Sutter a consacré à «La vie dans le Canton de Pange» (1). Son père, François Bolzinger, originaire de Metzervisse, était parfaitement bilingue, alors que sa mère Angélique Goulon, née à Goin-Verny, au cœur du pays francophone de la Seille, ne savait pas l'allemand. En 1910, François Bolzinger est muté à Scy, et c'est dans ce charmant village de vignerons que le Général passa une grande partie de sa jeunesse, où en hommage à son père, une école porte le nom de Bolzinger; il y avait sa maison, sa terre et son cœur. Sans doute, avec les autres «boserés» du village, a-t-il joué aux «chiques» sur «l'étroite terrasse, où la petite église couverte de ses longues ardoises est assise au milieu d'arbres ébouriffés». De là, comme Frédéric Asmus, il pouvait contempler «ce pays à la mesure humaine, vaste sans immensité, façonné et souple, et, près de sa rivière, Metz, toute plate au ras de la plaine, et que spiritualise le vaisseau de sa haute cathédrale» et il s'imprégnait «des trésors spirituels qui reposaient dans les terres étendues sous ses yeux» (2). Raymond Bolzinger avait toutes ses attaches familiales dans le pays messin; il était avant-dernier d'une famille de deux garçons et trois filles; un de ses oncles fut curé de Cheminot, puis aumônier de la Visitation. Un de ses frères, notaire, fut maire d'albestroff et conseiller général. Il aimait à le rappeler, en même temps que tout ce qu'il devait au Chanoine Collin qui fut l'âme de la résistance de la Lorraine annexée avant la guerre de Il épousa Marguerite Bardot, nièce du Docteur Bardot à qui les Montigniens, se souvenant d'un homme de bien, ont consacré une rue. De ce mariage devaient naître trois enfants. Il a eu la satisfaction de voir son fils entreprendre, en «vocation tardive», après des études supérieures de lettres, de brillantes études médicales et devenir un éminent spécialiste de psychiatrie et de psychologie. Une de ses filles, professeur de français, épouse d'un ingénieur géologue, a suivi celui-ci dans ses missions. L'autre, épouse d'un cadre supérieur de banque, après avoir été professeur au lycée Français de Londres, enseigne actuellement les sciences à l'ecole Normale Catholique à Paris. Ces enfants lui donnèrent 13 petits enfants; parmi les aînés, un étudiant en médecine de 4ème année, perpétue à la fois le nom et la tradition. Raymond Bolzinger eut la joie de connaître un arrière-petit-fils.

4 J'insiste à dessein sur ces détails car le Général Bolzinger n'était pas un déraciné et, conscient que celui qui aime son clocher et sa terre aime son pays, il était profondément attaché à son village de Scy et au Val de Metz; notre cité parlait à son cœur; son histoire lui était familière, et bon nombre d'entre nous se rappellent comment il s'animait lorsque la conversation (qu'il avait parfois un peu orientée) se fixait sur l'austrasie. Ses études à la Real-Schule, commencées sous le règne de Guillaume II, le menèrent à PAbitur. Raymond Bolzinger était un exemple type de cette génération, née sous l'annexion, qui avait sucé l'amour de la France avec le lait maternel; malgré l'école germanisée, il avait parfaitement assimilé non seulement sa langue maternelle, mais aussi la littérature française tout en retenant de la culture allemande ce que celle-ci peut avoir d'universel. Cette formation lui permit de poursuivre brillamment ses études à la Faculté de Médecine de Strasbourg, redevenue française. Inscrit d'abord au P.C.N. de la Faculté des Sciences, il passa en 1920 le concours d'entrée à l'ecole du Service de Santé Militaire de Lyon, se vouant d'emblée à une double vocation de servitude et de grandeur militaires et médicales. Il continua l'essentiel de ses études universitaires à Strasbourg, ville à laquelle il resta toujours très attaché, et qui il aimait à le rappeler, restait liée à l'ex- Lorraine annexée par le «poids de l'histoire». Ses études de «Santard» sont couronnées en 1924 à Lyon par une thèse sur la radioactivité des eaux minérales qui fait de lui le plus jeune docteur en médecine de France. Après un brillant stage au Val de Grâce, il fut affecté comme Médecin Aide-Major de 1ère classe au 2ème Bataillon de Chasseurs et rejoignit avec son unité les troupes du Maroc participant aux dernières opérations de la guerre du Rif; cette campagne devait lui valoir plusieurs distinctions, non seulement françaises, mais également espagnoles et marocaines. Il y fut sérieusement atteint par le paludisme et la dysenterie; il devait toute sa vie souffrir des séquelles de ces affections. De retour en France, il eut la joie d'être affecté en 1931 comme Médecin-Chef du 30ème Régiment de Dragons en garnison à Borny. Sa vocation l'oriente alors définitivement vers l'étude de la bactériologie, de l'épidémiologie et de l'hygiène, spécialités pour lesquelles il avait obtenu plusieurs diplômes à la Faculté de Médecine de Lyon. Il est admis comme stagiaire à l'institut Pasteur de Paris et désigné à la suite de ce stage comme Chef du Laboratoire Central du Service des Contagieux de la Vlème Région Militaire à l'hôpital Militaire Legouest de Metz, où il reste six années consécutives.

5 En 1939, le Médecin Commandant Bolzinger reçoit le commandement d'un Groupe Sanitaire de la Région fortifiée, puis la direction du Centre des Contagieux de la 3ème Armée, où ses qualités exceptionnelles de praticien et d'homme de science s'affirment dans la mise au point des méthodes naissantes de l'antibiothérapie au cours des graves épidémies de méningites cérébro-spinales. Après l'armistice, il est affecté au Laboratoire de la 9ème, puis de la 13ème Région de Clermont-Ferrand, où il poursuit son activité scientifique en liaison avec la Faculté des Sciences de Strasbourg, repliée dans cette ville. Il s'engage alors dans la résistance contre l'envahisseur et participe aux activités de l'e.m. 13, rattaché à l'o.r.a. Ces circonstances motivèrent son arrestation par la police allemande du 1er octobre 1943 au 10 décembre 1943, dans des conditions de captivité qui devaient aggraver considérablement son état de santé déjà fragilisé par ses affections tropicales; en outre, à l'époque, il se remettait lentement d'une fièvre de Malte contractée en service, maladie à laquelle sont particulièrement exposés les biologistes. Je reprends la relation que faisait le Médecin Général Bolzinger lui-même dans l'éloge funèbre du Général de Brigade Jean Colin : «Le 1er octobre 1943, les S. S. cernent l'immeuble du Commandement, arrêtent les occupants, les incarcèrent à la sinistre prison du «92», d'odieuse mémoire... Ayant échappé à leur calvaire, je ne puis sans émotion évoquer le souvenir de ces 40 officiers et sous-officiers, mes compagnons, la plupart fusillés, massacrés dans leur cellule, ou déportés dans les camps de la mort. Peu nombreux furent les survivants. Rappelons que figuraient parmi ceux qui ne revinrent pas, le Colonel de Cugnac, mort à Buchenwald, fils de notre Confrère le Général de Cugnac, le commandant de réserve Félix Peupion, Maire de Montigny-lès-Metz, ancien Président de l'académie, affecté à cette époque au 4ème Bureau de la 13ème Région». Peut-être, dans les circonstances qui amenèrent la libération du Médecin Commandant Bolzinger, a joué, pour une fois, entre ennemis, un reste d'esprit chevaleresque et d'honneur militaire. En effet, fidèle à son Serment d'hippocrate et à l'esprit, comme à la lettre, de la Convention de Genève, le Commandant Bolzinger avait été antérieurement appelé en consultation au chevet du général de division allemand Stud. Son avis pertinent avait permis d'établir un diagnostic précis et un traitement qui sauva la vie de ce général. Notre Confrère a toujours pensé que c'était vraisemblablement l'intervention reconnaissante de celui-ci qui lui avait permis d'échapper in-extremis au sort qui fut celui de certains camarades de son groupe. Sans doute, treize ans plus tard, se rappelait-il cet épisode, lorsque, sur la terre allemande, inaugurant l'hôpital Militaire de Buhl, il rappelait la devise de la Croix Rouge «INTER ARMA CARITAS».

6 En 1944, il rejoint le terrain d'opérations d'alsace de la 1ère Armée Française, combattant pour la libération du territoire. Le Médecin Lieutenant-Colonel Bolzinger, après avoir assuré la chefferie de la Place de Colmar, puis celle de différents hôpitaux de campagne installés en territoire allemand, reçoit la direction du Laboratoire Central de la 1ère Armée installée à Tubingen. Nous le retrouverons à Metz en 1948, où colonel, il est Médecin Chef de l'hôpital Militaire Legouest et sous-directeur du Service de Santé de la Vlème Région Militaire. Puis, après avoir été sous-directeur du Service de Santé des Forces Françaises en Allemagne en 1953, le Médecin Colonel Bolzinger reçoit en 1956 la direction des Services de Santé des Forces Françaises en Allemagne. C'est là qu'il fait construire à Buhl l'hôpital Complémentaire d'armée «Francis-Picaud». Cet établissement modèle, supérieurement équipé, est destiné aux soins des Forces Françaises d'allemagne et des familles des militaires français. Il marque la trace de son passage sur la terre allemande. Il est nommé Médecin Général en février 1958; son affectation en 1959 à la Direction des Services de Santé de la Vlème Région Militaire dont le siège est à Metz, le comble bien entendu de satisfaction. Au cours de sa carrière le Médecin Général devait récolter de très nombreuses distinctions, entre autres, la médaille des épidémies (qui est en quelque sorte la «Croix de guerre du Médecin»), la médaille de la Santé Publique, les Palmes Académiques, la médaille du service volontaire, sans compter les décorations espagnoles et marocaines dues à la campagne du Rif; son activité scientifique lui avait valu la médaille de vermeil du service de santé militaire. Il était officier de la Légion d'honneur. Après plus de 40 années de vie militaire, dont près de 15 de campagnes, il est admis dans le Cadre de Réserve en avril Il ne pouvait prendre sa retraite qu'à Metz, ville si chère à son cœur et proche de Scy où il aimait faire de longs séjours dans la maison familiale qu'il avait conservée. Lors de son adieu aux armes, le Général Lecocq alors Gouverneur Militaire de Metz, conclut l'ordre général n 11 de la façon suivante : «Au cours de sa carrière, les Chefs qui ont apprécié le Médecin Général Bolzinger ont manifesté pour lui, la même estime, la même confiance : homme de devoir, scrupuleux, actif et dévoué, Médecin Militaire d'élite, savant très attaché à l'armée et à sa mission, officier distingué d'allure et d'esprit, doué d'un jugement et d'une pondération remarquables. En

7 même temps, le Médecin Général Bolzinger a mérité et reçu les plus brillants témoignages d'une science constamment accrue au service de l'armée et du pays... Nous lui souhaitons non pas une longue et paisible retraite, mais plutôt de continuer d'assurer longtemps avec le même bonheur, auprès de l'académie Nationale de Metz, le rayonnement de l'armée et^sur le plan scientifique, de poursuivre son action au bénéfice des hommes pour le plus grand bien du Pays et de l'armée». Pour qui connaît le tempéramment de notre Confrère, ce souhait du Général Lecocq ne pouvait que se réaliser. Aussitôt rendu à la vie civile, il reprit des responsabilités dans différentes associations, avec qui il avait gardé le contact, grâce à ses différents passages à Metz. Nous reviendrons sur son action au sein de PAcadémie Nationale, mais nous rappelons qu'il fut Membre Fondateur et Président de la Société des Sciences Médicales de la Moselle, dont il rappela l'historique dans une communication à l'académie. Il fut Vice-Président et membre honoraire (c'est-à-dire «honoré») de la Société d'histoire Naturelle de la Moselle et à ce titre, fit entre autres, une communication en 1975 sur «Le destin militaire et médical des frères Monard» (3). Il fut membre de la Société Française d'histoire de la Médecine et de la Société d'histoire et d'archéologie de la Lorraine. En plus, il accepta les fonctions de Membre du Conseil Départemental d'hygiène et de la Commission de la Prévention Routière et devint Président du Comité Départemental de la Ligue Anti-Cancéreuse. Les talents qu'il avait déjà développés lors de la construction de l'hôpital Complémentaire des Armées «Francis-Picaud» de Buhl en 1956, allaient trouver un nouveau champ d'action dans l'extension et la modernisation de l'hôpital Belle-Isle, qu'il dirigea comme Président du Conseil d'administration; ces travaux furent menés à bien, grâce aux conceptions techniques de notre confrère, mais aussi grâce à son autorité et à ses relations qui ont permis de débloquer les fonds nécessaires. A vrai dire, les problèmes hospitaliers passionnaient le Général; ils le passionnaient sur le terrain car il fut un grand constructeur; ils le passionnaient aussi dans son activité d'érudit, si l'on en juge par un certain nombre de ses publications. Dès 1937 devant les Officiers de Réserve du Service de Santé de l'ecole de Perfectionnement de Metz, il tenait une conférence dans laquelle il développait l'histoire de l'hôpital Militaire d'instruction de Metz, entre 1718 et Et dès cette date, il concluait par le vœu qu'une plaque commémorative vienne un jour rappeler à nos compatriotes que pendant plus de deux siècles, l'hôpital du Fort Moselle avait bien mérité de l'humanité de la nation et de la cité.

8 Le 22 avril 1961, il organisait devant un parterre de personnalités militaires et civiles, une cérémonie commémorative de l'hôpital- Amphithéâtre d'instruction et de Perfectionnement de Metz du Corps de Santé Militaire, dont les bâtiments servent actuellement à l'ecole de la Sidérurgie «Louis-Moreau». Le Médecin Général Inspecteur de Benedetti, Directeur Central du Service de Santé, inaugura la plaque qui se trouve à droite en entrant sous le porche; elle porte le texte suivant, rédigé par le Général Bolzinger : «Ce Bâtiment y édifié en 1732 aux frais du Roi par Louis de Cormontaigne a servi d'hôpital-amphithéâtre d'instruction et de perfectionnement des Officiers du Corps de Santé Militaire. Il a fourni en particulier, aux Armées du 1er Empire 700 chirurgiens, dont les deux tiers succombèrent sur les champs de bataille. Il cessa ses fonctions d'enseignement le 1er Décembre 1850, mais resta jusqu'en 1912 l'hôpital de Garnison de Metz. Dans ces murs, témoins de toutes les misères qui frappèrent les armées en campagne comme en temps de paix, sont morts de nombreuses victimes d'épidémies meurtrières et de glorieux blessés des guerres qui illustrèrent sur les marches de l'est deux siècles d'histoire de France». Dans l'allocution qu'il prononça à cette occasion, notre confrère, après avoir rappelé l'histoire de ces bâtiments et les trésors de science, de dévouement et de charité dont l'ecole fut la généreuse dispensatrice, se félicitait de voir accompli le vœu qu'il avait formulé en 1937; il remercia tous ceux qui avaient permis de l'exaucer, en particulier, la Société Amicale des Elèves et anciens Elèves du Val de Grâce, dont il était également un des membres fidèles. Le Médecin Général Bolzinger se consacra avec un soin tout particulier à l'édition d'une très belle brochure illustrée consacrée à l'histoire de l'hôpital-amphithéâtre et aux cérémonies du 22 avril 1961; cette brochure se trouve dans la bibliothèque de la plupart d'entre nous (4). Enfin au 103ème Congrès National des Sociétés Savantes de Nancy en 1978, il retraça avec le Doyen Antoine Beau l'histoire de cet Hôpital, où professèrent de grands Maîtres du Corps de Santé Militaire et où furent formés de nombreux et brillants élèves (5). L'intérêt qu'il portait à l'histoire de cet Hôpital d'instruction, se réveilla lorsqu'en 1980 on célébra le HOème anniversaire de la Poste Aérienne, qui y fut créée le 5 septembre Les organisateurs trouvèrent auprès de lui, toute la compréhension et toute l'aide souhaitables, en parti-

9 culier, lorsqu'il fut question d'intéresser à cette commémoration, les Elèves et anciens Elèves du Val de Grâce. Mais il ne s'intéressa pas seulement à l'histoire hospitalière militaire; il publia à la Société Française d'histoire de la Médecine avec Monsieur Gilbrin et Monsieur Lorrang sur «l'hôpital Saint-Nicolas de Metz avant la Révolution». Enfin, lorsqu'il fut question de baptiser les nouvelles unités hospitalières construites à Devant-les-Ponts, c'est à lui que l'on s'adressa; en proposant le nom de «FELIX MARÉCHAL» ancien Médecin des Hôpitaux et Maire de Metz en 1870, il fut avec le Docteur Masius, le parrain de ce nouvel établissement. Rappelons enfin l'activité qu'il a déployée pendant de nombreuses années comme Président du Comité de la Ligue Anti-Cancéreuse du département; il fréquenta régulièrement au Centre Hospitalier les consultations avancées du Centre Paul-Strauss de Strasbourg où il se faisait un plaisir de retrouver le Professeur Chevallier et le Professeur Kuntzmann avec qui il partageait un certain nombre de souvenirs strasbourgeois. Ses origines, sa formation, son tempérament ne pouvaient que l'amener à être un membre très actif du Souvenir Français. Nombreux, parmi nous, sont ceux qui se souviennent de sa présence active, en uniforme, dans les manifestations de ce mouvement, en particulier, lors des commémorations du centenaire de 1870 sur les champs de bataille de Ladonchamp, de Noiseville et autres. Mais parmi toutes les Sociétés, nous pouvons affirmer sans crainte d'erreur, que c'est l'académie qui tenait la plus grande place dans le cœur du Général. Cette affection il l'a marquée avant tout par sa fidélité aux réunions; il se faisait un devoir d'y assister, même malgré l'aggravation progressive de sa maladie. Il fut élu Membre Titulaire le 2 juin 1949, «sans autres stages propitiatoires» ainsi qu'il se plaisait à le faire remarquer. Sa candidature avait été soutenue par le Docteur BOULANGIER; elle avait été proposée par Monsieur NAVEL et Monsieur DELAFOSSE, qui était à l'époque, Président de l'académie et qui fut, je me plais à le souligner ici, un des professeurs qui ont eu le plus d'influence sur l'orientation de ma vie. Dès 1950, il fut Vice-Président de celle-ci jusqu'à son départ en Allemagne comme Sous-Directeur du Service de Santé des Forces Françaises;

10 mais de retour à Metz, comme Directeur du Service de Santé de la Vlème Région Militaire, il fut de nouveau Vice-Président de 1961 à 1962 et Président de 1965 à Il contribua lors de cette présidence à l'installation de l'académie dans les locaux où nous siégeons et à la commande de la magnifique tapisserie de Jean PICART-LEDOUX qui fait l'ornement de la salle de réunion. Sans négliger son rôle, disons administratif, comme Président de l'académie, puis de la Commission des Sciences et de l'agriculture, il ne cessa d'apporter une contribution irremplaçable à nos travaux par l'intermédiaire de publications caractéristiques de sa tournure d'esprit, car elles sont consacrées à des problèmes scientifiques, militaires et messins. Le 5 février 1959, il fait un exposé sur «Biologie et Techniques» (6). En janvier 1971, il relate la vie du «Médecin Principal E. Grellois, Médecin-Chef des Ambulances Civiles et Militaires de Metz, durant le Blocus de 1870, dernier Président de l'académie Nationale de Metz» (7) et le 1er avril de la même année, celle de «Félix Maréchal, décédé le 29 mars 1871, l'homme fait Metz» (8). Puis à l'occasion du Bi-centenaire de la Guerre de l'indépendance des Etats-Unis, le Général fait le 2 décembre 1976, une très intéressante communication avec projections sur : «Le Service de Santé de l'armée de Rochambeau et ses Participants Messins» (9). Il devait en avril 1978, pour la dernière fois, prendre la parole à nôtre Académie sur un sujet qui lui tenait particulièrement à cœur : «La Fondation et le début de la Société des Sciences Médicales de la Moselle en 1819» (10). Nous n'oublions pas qu'il assura la résurrection de cette Société. Il avait en préparation un travail sur Antoine LOUIS, un des «Illustres» du Grand Salon de l'hôtel de Ville. Ce sujet ne pouvait que le passionner : Antoine LOUIS était Messin, chirurgien en chef de l'armée du Roi, Inspecteur Général des Hôpitaux Militaires du Royaume et Secrétaire Perpétuel de l'académie Royale de Chirurgie; pour la petite histoire, on se rappelle qu'il faillit léguer son nom à la guillotine, qui s'appela un certain temps la «Louisette». Raymond Bolzinger ne put terminer son travail, mais l'essentiel de la documentation a été rassemblé; espérons qu'à titre posthume, cette publication pourra un jour nous être présentée. Mais outre ses publications faites dans nos réunions habituelles, il faut noter également les interventions qu'il fit en tant que Président, aux séances solennelles de notre Compagnie.

11 En 1965, il relate «l'histoire des Sociétés Savantes» (11) en particulier, celles de Metz. En 1966, il s'attaque à un autre sujet de ses préoccupations : «Comment l'académie de Metz a contribué à la promotion de la connaissance scientifique au profit de tous les hommes, et comment elle a contribué à la marche de Metz à la promotion de l'enseignement supérieur» (12). Il se félicite dans cette conférence des résultats obtenus et dont l'académie a été le témoin actif et séculaire, malgré les vicissitudes de l'histoire. Une causerie, faite en 1961 devant les membres du Rotary sur la «Pratique et l'enseignement de l'art médical dans ses manifestations messines au cours des derniers siècles» confirme une fois de plus, l'intérêt qu'il portait à cette question. Entre temps, à la séance du 1er juin 1961, il prononçait l'éloge funèbre du Docteur Georges BOULANGIER (13) qui avait été son «parrain» à l'académie. En 1969, il rendit hommage au Professeur Jean-Paul JEAN- DELIZE (14) et en 1974 au Général de Brigade Jean COLIN (15) qui fut son compagnon d'armes et de captivité. Peut-être faut-il rappeler ici que, dans le cadre des manifestations du 4ème centenaire du rattachement des Trois-Evêchés à la France, il donna à l'hôtel de Ville, le 20 février 1952, une Conférence sur «Ambroise Paré au Siège de Metz 1552». J'ai eu à connaître encore plus intimement le Médecin Général Bolzinger et à l'assister, autant que faire se peut, dans des conditions pénibles, parfois mêmes tragiques. Grâce aux dialogues privilégiés qui existent entre le patient et son médecin, entre «l'homme horizontal et l'homme vertical», nous avons pu parler très souvent à cœur ouvert; la pudeur et la discrétion ne me permettent pas d'être plus explicite, mais je puis tout de même dire combien j'ai été impressionné et souvent ému par la sérénité et le stoïcisme de mon patient. Il se rendait parfaitement compte qu'il ne pourrait pas publier à l'académie les travaux qu'il avait en cours; cela l'attristait; il ne le cachait pas; mais il tournait la page, sans révolte, avec sérénité, conscient d'avoir accompli sa tâche sur terre, et prêt dans sa foi à rejoindre ceux qu'il avait aimés. Puis-je rappeler également avec émotion le 21 avril 1983, 15 jours avant son décès; c'était l'anniversaire de ses 82 ans; il s'était donné ce but à atteindre pour lequel il nous pardonnait des interventions qui auraient pu être considérées comme un acharnement thérapeutique. Mais autant qu'à nos traitements, cette stabilisation était due à la volonté farouche qu'il avait manifesté de passer ce cap. Ce fut peut-être sa dernière joie; il voulut que tout l'entourage y participa en offrant le Champagne au Service : infir-

12 mières, personnel et médecins ont fêté ensemble avec lui cette victoire provisoire sur la mort, dont il tirait une certaine fierté. En parfaite lucidité, il avait rédigé ses dernières volontés dans les moindres détails, y compris Pimage-souvenir pour laquelle il a désigné la photographie et les maximes qu'il voulait y voir imprimer. Il avait retenu en particulier, cette phrase de Saint Augustin : «Il a donné aux siens l'exemple d'une vie de travail, de devoir et de dévouement». Ce message posthume s'adresse à nous; en effet, le Général portait une profonde affection à l'académie à laquelle dans son discours de réception il faisait acte de «filiale déférence de la part d'un enfant du pays messin, profondément sensible à l'éclat des valeurs spirituelles et affectives qu 'elle représente à ses yeux... et qui rassemble dans une vivante et harmonieuse synthèse toutes les aspirations passées, présentes et futures de cette âme collective». C'est pourquoi, témoins de ses travaux au sein de cette Compagnie, nous pouvons nous considérer également comme ses proches et recueillir le dernier message qu'il nous a transmis. C'est donc dans la fidélité à son exemple que nous garderons le souvenir du Confrère, de l'érudit, du citoyen, mais surtout de l'ami. (1) Antoine Sutter, «La vie dans le Canton de Pange aux Portes de Metz», éd. Le Lorrain. (2) Maurice Barrés - Colette Baudoche. (3) «Le destin militaire et médical des frères Monard», Société d*histoire Naturelle de la Moselle, 41ème Cahier, 1975, p. 19 à 36. (4) Hôpital-Amphithéâtre d'instruction et de Perfectionnement du Corps de Santé Militaire - METZ. (5) Raymond Bolzinger - Antoine Beau. 103ème Congrès National Soc. Savantes Nancy-Metz Sciences fasc. V, p (6) Mémoires Académie Nationale de Metz, Vème série, tome V, , p (7) Mémoires Académie Nationale de Metz, Vème série, tome IV, , p (8) Mémoires Académie Nationale de Metz, Vème série, tome XIV, , p (9) Mémoires Académie Nationale de Metz, Vlème série, tome IV-V, , p (10) Mémoires Académie Nationale de Metz, Vlème série, tome VI, 1978, p (11) Mémoires Académie Nationale de Metz, Vème série, tome X, p. V-XXVIII. (12) Mémoires Académie Nationale de Metz, tome XI, p. V-XVI. (13) Mémoires Académie Nationale de Metz, Vlème série, tome II, 1975, p (14) Mémoires Académie Nationale de Metz, Vème série, tome XIV, 1972, p. 1 à 6. (15) Mémoires Académie Nationale de Metz, Vlème série, tome I, 1974, p

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